Conclusions de l'avocat général Alber présentées le 26 octobre 2000. - Commission des Communautés européennes contre République française. - Manquement d'Etat - Directive 97/66/CE - Traitement des données à caractère personnel et protection de la vie privée dans le secteur des télécommunications - Non-transposition. - Affaire C-151/00.
Recueil de jurisprudence 2001 page I-00625
1. Dans le présent recours en manquement, la Commission reproche à la République française un défaut de transposition des dispositions de la directive 97/66/CE du Parlement européen et du Conseil, du 15 décembre 1997, concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des télécommunications (ci-après la «directive»).
2. L'article 15 de la directive s'énonce comme suit:
«1. Les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive au plus tard le 24 octobre 1998.
Par dérogation au premier alinéa, les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à l'article 5 de la présente directive au plus tard le 24 octobre 2000.
...
4. Les États membres communiquent à la Commission le texte des dispositions de droit interne qu'ils adoptent dans le domaine régi par la présente directive.»
3. La Commission n'a reçu aucune communication de la République française concernant la transposition de la directive. Conformément à l'article 226 CE, elle a donc envoyé au gouvernement français une lettre de mise en demeure, en date du 3 février 1999, invitant celui-ci à faire connaître ses observations dans un délai de deux mois.
4. Par lettre enregistrée le 16 avril 1999, la République française a fait savoir que la directive avait déjà été partiellement transposée et que les dispositions restantes seraient transposées par décret dans un proche avenir.
5. N'ayant pas reçu d'autre communication des autorités françaises, la Commission a adressé, le 23 juillet 1999, un avis motivé à la République française. Elle y faisait grief à celle-ci d'avoir manqué à son obligation de transposer en temps utile les dispositions de la directive citées dans le recours. Elle a donné à la République française un dernier délai de deux mois pour se conformer à ses obligations.
6. Les autorités françaises ont demandé ensuite une prolongation de délai et ont fait savoir de nouveau par lettre du 22 octobre 1999 que les mesures nécessaires de transposition des dispositions concernées étaient en cours d'élaboration.
7. N'ayant pas reçu de nouvelle communication entre-temps, la Commission a introduit, le 19 avril 2000, le présent recours contre la République française.
8. La Commission des Communautés européennes a conclu qu'il plaise à la Cour:
1) constater qu'en ne mettant pas en vigueur et en ne communiquant pas à la Commission dans le délai prescrit les mesures nationales de transposition de l'article 4, paragraphe 2, l'article 6, paragraphes 1, 3 et 4, l'article 7, l'article 8, paragraphes 2, 3, 4 et 6, l'article 11, paragraphe 2, et l'article 12 de la directive 97/66/CE, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 15 de la directive susvisée;
2) condamner la République française aux dépens.
Les arguments des parties
9. La Commission constate que l'article 249, paragraphe 3, CE et l'article 10 CE imposent aux États membres de prendre les mesures nécessaires pour transposer les directives dans leur droit interne avant l'échéance du délai qui leur est imparti. Les États membres sont aussi tenus de communiquer sans délai ces mesures à la Commission. Le délai fixé à l'article 15, paragraphe 1, de la directive est arrivé à échéance le 24 octobre 1998, sans que la République française ait arrêté les mesures de transposition des dispositions mentionnées dans le recours. Même à la date du 23 septembre 1999, échéance du délai accordé dans l'avis motivé, les autorités françaises n'avaient pas fait savoir à la Commission que les dispositions en question avaient été transposées.
10. Se référant à l'arrêt rendu dans l'affaire 52/75 , la Commission souligne que les États membres sont engagés, quel que soit l'organe de l'État dont l'action est à l'origine du manquement, et qu'un État membre ne saurait exciper de dispositions, pratiques ou situations de son ordre interne pour justifier le non-respect des obligations et délais résultant des directives communautaires.
11. La République française fait valoir de nouveau que la réglementation nécessaire pour transposer les dispositions en cause est en cours d'élaboration.
Appréciation
12. Le recours est fondé. Il est constant que le grief subsiste à la date pertinente dans le cadre de la procédure en manquement, à l'échéance du délai de deux mois à compter du 23 juillet 1999 fixé dans l'avis motivé, et cela même en tenant compte d'éventuelles prorogations de délai en raison de l'éloignement. Il convient donc de condamner la République française conformément aux conclusions du recours.
13. Il est statué sur les dépens conformément à l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure.
14. Nous proposons donc à la Cour de décider ce qui suit:
«1) La République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 15 de la directive 97/66/CE du Parlement européen et du Conseil, du 15 décembre 1997, concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des télécommunications, en ne mettant pas en vigueur et en ne communiquant pas à la Commission dans le délai prescrit les mesures nationales de transposition de l'article 4, paragraphe 2, l'article 6, paragraphes 1, 3 et 4, l'article 7, l'article 8, paragraphes 2, 3, 4 et 6, l'article 11, paragraphe 2, et l'article 12 de ladite directive.
2) La République française est condamnée aux dépens.»